Par Côme ROBET, Président CNCEF CRÉDIT
La responsabilité est-elle soluble dans la politique ? Il semblerait que oui. Car nos représentants, qui assurent à longueur de plateaux TV n’avoir pour seule boussole que « l’intérêt des Français », sont curieusement absents lorsqu’il s’agit de le prouver. En garantissant d’abord à ces Français qu’ils chérissent tant leur droit le plus vital : se loger. En ne détricotant pas méthodiquement, après deux ans de crise du logement, les mesures qui permettraient d’y parvenir.
Un effet domino délétère
Les chiffres ne mentent pas.
La production de crédits à fin novembre recule encore de 2% [1], les ventes de logements neufs ont chuté de 41% en un an au 3ème trimestre [2] et celles de logements anciens de 18% entre août 2023 et août 2024 [3]. L’offre de logements à louer diminue dans beaucoup de territoires tendus (-8,6 % entre octobre 2023 et octobre 2024 [4] et il manquait toujours 250 000 logements pour les 3 millions d’étudiants à la rentrée 2024 [5]…
Qu’il s’agisse de louer ou d’acheter, les Français ont toujours les plus grandes difficultés à se loger.
Valérie Létard avait pourtant envoyé des signaux encourageants avec notamment le Prêt à Taux Zéro accessible aux maisons individuelles et étendu à tout le territoire.
Mais ces propositions de bon sens se heurtent à la vision de nos politiques, qui continuent à penser l’immobilier comme une dépense dans le budget de l’État, sans regarder ce qu’il rapporte en droits de mutation, en recettes de TVA, mais surtout en emplois.
Les défaillances de constructeurs ont augmenté de 26% et celles des promoteurs de 85% en un an6! Survie oblige, ceux qui dans le neuf n’ont plus de travail se tournent vers la rénovation, mais ce n’est pas le même métier …
Enfin, nos entreprises de courtage en crédit sont touchées et souffrent en silence. A leur tête, des chefs d’entreprise qui ont géré prudemment mais font les frais de cette vision et n’auront pas d’indemnisation chômage.
Ces retards ne se rattraperont pas. Le marché est bel et bien cassé.
Arrêter le gâchis
Le génie français est unanimement salué quand il produit des événements spectaculaires comme les Jeux Olympiques et Paralympiques, ou qu’il rénove en un temps record Notre Dame.
Nous espérons qu’il trouve urgemment à s’exprimer pour sortir d’un blocage qui n’a que trop duré. Car ceux qui prennent les décisions ne sont toujours pas à la hauteur.
Nous ne pouvons plus nous permettre les débats orageux, les motions de censure à répétition, les guéguerres politiques, les tractations et les pactes de non-agression. Pas sur quelque chose d’aussi vital que le logement. La perte de confiance est avérée, les Français ne pardonneront pas à leurs représentants de ne pas faire consensus sur un sujet aussi important.
Même si Noël approche, il n’est plus temps de tout réexpliquer à chaque nouveau gouvernement. Mais nous devons espérer une lumière au bout du tunnel, ne pas enclencher à nouveau 6 mois de consultations, publier des décrets immédiatement pour que les Français puissent s’engager, acheter et relancer toute la chaîne de l’immobilier.
La BCE a fait un geste et les taux vont continuer de baisser pour permettre aux ménages de retrouver un peu de pouvoir d’achat immobilier. Mais le moral des Français est touché …
De leur côté, les banques ont, elles aussi, joué le jeu en étant créatives pour ne pas assécher complètement l’octroi de crédit. Les investisseurs reviennent, timidement certes, mais avec l’envie.
Et pendant ce temps, le Haut Conseil de Stabilité Financière, si prompt à cadenasser l’octroi de crédit, est porté disparu…
S’unir et relancer l’immobilier
Nous avons été abreuvés d’annonces de « chocs » (de l’offre, de simplification, …) mais ce sont les Français et les professionnels de l’immobilier qui les ont subis.
Ils peinent aujourd’hui à discerner ce que veulent véritablement nos politiques en matière de logement. Les orientations sont erratiques et manquent de clarté. Nos gouvernants manquent de courage.
Nous alertions en janvier Monsieur Attal, fraîchement nommé Premier ministre, sur l’urgence à débloquer des secteurs de l’immobilier et du logement aux abois : « La responsabilité de ce qui se passera demain n’incombera qu’au gouvernement, et à lui seul. ». Force est de constater que nos appels sont restés lettre morte.
Or, s’il est un sujet d’union nationale autour duquel gouvernants, autorités et élus doivent se retrouver, c’est bien le logement. Il concerne absolument tous les Français, sans exception, dans ce qu’ils ont de plus vital ! Nos représentants doivent se montrer à la hauteur de cet enjeu.
[1] Tableau de bord Novembre 2024 – Observatoire Crédit Logement/CSA
[2] Observatoire de l’immobilier neuf – Fédération des Promoteurs Immobiliers
[4] Bilan du marché locatif 2024 – Meilleurs Agents
[5] Estimation de l’Association interprofessionnelle des résidences étudiantes et services
[6] Étude de défaillances et sauvegardes des entreprises 3e trimestre 2024-Altares
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