Par Pascale GLOSER, Présidente de CNCEF PATRIMOINE, association professionnelle agréée de Conseils en Investissements Financiers et en Gestion de Patrimoine
Les influenceurs financiers, ou fininfluenceurs, ont le vent en poupe sur les réseaux sociaux. Mais s’ils ont le mérite de faire œuvre de pédagogie auprès du grand public, tous ne peuvent pas être crédités de la confiance nécessaire lorsqu’ils abordent un domaine aussi crucial que le patrimoine de leurs abonnés. Le conseil en investissements financiers est un métier et ne s’improvise pas.
Des compétences pas toujours solides, ni vérifiées
Dans le monde merveilleux de LinkedIn, YouTube, X et Instagram, les rendements des produits recommandés par les quelque 800 influenceurs financiers actifs recensés en France sont toujours mirobolants. Gestion de budget, investissement en Bourse, gestion patrimoniale, trading, ou crypto-monnaies ; rien n’échappe à l’intervention de ceux qui veulent du bien à notre argent !
Parmi eux, beaucoup sont des économistes reconnus ou des professionnels de l’investissement ou de la gestion de patrimoine certifiés. Mais ce n’est pas le cas de tous ceux qui dispensent à longueur de posts et de vidéos des conseils à leurs milliers – ou parfois millions – de followers pour gérer leur argent, investir ou préparer leur retraite.
Or, le conseil en Investissements Financiers et en Gestion de Patrimoine est un métier, que l’on exerce dans la très grande majorité des cas après un diplôme universitaire, d’école de commerce ou de gestion. Il est soumis à une obligation annuelle de formation continue, à des règles de bonne conduite et à un double contrôle de l’Autorité des Marchés Financiers et de l’association professionnelle à laquelle ils sont tenus d’adhérer.
Comment alors démêler le bon grain de l’ivraie ?
La réponse de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) et de l’AMF est un premier pas. Mais le Certificat option « Publicité financière » est-il vraiment suffisant pour garantir que l’influenceur qui l’obtient maîtrise les impacts de la promotion de produits financiers et la réglementation pléthorique qui lui est associée ? Avec une formation de 2 heures et un test blanc de 20 minutes avant l’examen final sous forme de QCM, on peut en douter.
On peut également douter de l’« influenceur influencé » qui, comme ses confrères prescripteurs de tendances mode ou gastronomie, peut être sponsorisé ou détenteur de partenariats pour faire du placement de produits. L’ARPP et l’ACPR sont donc convenues de la nécessité de partager régulièrement des informations sur leurs activités de veille et de surveillance des publicités financières[1].
Nous notons enfin que le site public Signal Conso, dédié aux consommateurs qui rencontrent des problèmes avec des entreprises, a prévu une rubrique spécifique pour les influenceurs…
Les deux côtés de la médaille de l’influence digitale
Les fininfluenceurs jouent un rôle appréciable dans la démocratisation de la culture financière : leurs formats gratuits, courts et souvent ludiques sont appréciés, et particulièrement des jeunes, car ils privilégient des termes compréhensibles au jargon technique. Ce faisant, ils rendent accessibles des notions parfois complexes et encouragent l’épargne et l’investissement.
On ne peut que s’en féliciter tant la culture financière des Français est déficiente. Car si une très grande majorité d’entre eux épargnent, leur compréhension des mécanismes d’investissement, ainsi que la connaissance de leurs possibilités en la matière restent lacunaires : un peu plus d’un sur deux seulement sont confiants dans leurs propres connaissances financières.[2]
Le fait que 43% d’entre eux refusent tout risque pour leur épargne[3] pourrait paradoxalement les retenir de se jeter sur le premier produit miracle en fonction de la tendance du moment. Encore faut-il qu’ils soient avertis, selon l’expression consacrée, que « les performances passées ne garantissent pas les résultats futurs ».
Car les placements sont tout sauf une décision one shot. Ils s’inscrivent au contraire dans une stratégie globale qui prend en compte l’âge de l’investisseur, sa situation professionnelle et familiale, sa capacité d’épargne, ses projets de vie. Et le maître-mot est la prudence, car les risques sont réels.
Manque de compétences, vision parcellaire, risques associés ; suivre aveuglément un influenceur peut motiver des décisions inadaptées à sa situation et, plus inquiétant, provoquer des pertes potentielles sur des placements complexes ou risqués. Quid de de la fiabilité du produit, de son émetteur et de son distributeur, de l’épargne de précaution nécessaire, de la diversification, de la fiscalité à prévoir ?
Les formations ou vidéos en ligne sont une première étape utile pour se familiariser avec l’univers des placements avant d’aller plus loin en faisant appel à un professionnel qualifié, Conseil en Investissements Financiers ou en Gestion de Patrimoine qui saura effectuer une analyse personnalisée. Parce que l’investissement n’est ni une tendance, ni une mode, mais un choix décisif qui a des conséquences aujourd’hui, mais aussi demain.
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[1] Communiqué de presse ACPR 30 Juin 2025
[2] Sondage IFOP pour Trade Republic Les Français et l’éducation financière juillet 2024
[3] Baromètre AMF de l’épargne et de l’investissement 2024
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